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8
O
Oxygène
16
S
Soufre
Produit minéral

Le dioxyde de soufre présent dans l’atmosphère résulte principalement des combustions de charbon et de pétrole ainsi que de l’activité volcanique. Toutefois, ces dernières années de nombreux progrès ont été réalisés pour limiter les émissions liées aux activités humaines et ainsi éviter des catastrophes comme celle survenue en 1952 à Londres, avec des milliers de morts.

Données physico-chimiques

Données atomiques

Formule Masse molaire Distance interatomique : S-O Angle O-S-O Moment dipolaire
SO2 64,06 g.mol-1 143 pm 119,5° 1,663 D

Données physiques

Masse volumique Température de fusion Température d’ébullition Température critique Pression critique Température  point triple Pression point triple Conductibilité thermique Solubilité dans l’eau
  • gazeux, à 15°C, 101,3 kPa : 2,763.10-3 g.cm-3
  • liquide, à temp. d’ébullition : 0,949 g.cm-3
-72,7°C -10°C 157,49°C 7 884 kPa -75,45°C 16,74 kPa 8,43 W.m-1K-1
  • à 0°C : 22,8 cm3/100 g d’eau
  • à 90°C : 0,5 cm3/100 g d’eau

Données chimiques

pKa : H2SO3/HSO3 pKa : HSO3 /SO32-
1,8 7,2

Potentiels standards :

SO42- + 4H+ + 2e = H2SO3 + H2O E° = 0,17 V
SO42- + H2O + 2e = SO32- + 2OH E° = -0,93 V
S2O62- + 4H+ + 2e = 2H2SO3 + H2O E° = 0,6 V
2H2SO3 + H+ + 2e = HS2O4 + 2H2O E° = -0,08 V
2SO32- + 2H2O + 2e = S2O42- + 4OH E° = -1,12 V
2H2SO3 + 2H+ + 4e = S2O32- + 3H2O E° = 0,40 V
2SO32- + 3H2O + 4e = S2O32- + 6OH E° = -0,58 V
SO32- + 3H2O + 4e = S(s)+ 6OH E° = -0,66 V

Données thermodynamiques

Dioxyde de soufre gazeux :

  • Enthalpie molaire standard de formation à 298,15 K : -296,81 kJ.mol-1
  • Enthalpie libre molaire standard de formation à 298,15 K : -300,2 kJ.mol-1
  • Entropie molaire standard à 298,15 K : S° = 248,11 J.K-1mol-1
  • Capacité thermique molaire sous pression constante à 298,15 K : Cp° = 39,9 J.K-1mol-1
Dioxyde de soufre liquide :

  • Enthalpie molaire standard de formation à 298,15 K : -320,6 kJ.mol-1
  • Enthalpie molaire standard de fusion à la température de fusion : 7,4 kJ.mol-1
  • Enthalpie molaire standard d’ébullition à la température d’ébullition : 24,9 kJ.mol-1

Données industrielles

Les teneurs moyennes de l’atmosphère en dioxyde de soufre (SO2) observées, en France métropolitaine et DOM, en 2016, sont de 2,8 µg.m-3 en zone industrielle et 1,9 µg.m-3 en zone urbaine avec un maximum de 15 µg.m-3 en milieu industriel et 12 µg.m-3 en milieu urbain. Elles étaient respectivement, en moyenne, de 54 et 2 µg.m-3 en 2000.
Pour l’Île de France, la moyenne annuelle, en 2019, et depuis 2009, est inférieure à la limite de détection de 5 µg.m-3 (la valeur était de 27 µg.m-3 en 1991 et de 364 µg.m-3 en 1958).

Les émissions totales, dans le monde, de SO2 étaient estimées, en 2005, à 135 millions de t, dont 115 millions de t dues aux émissions anthropogéniques (humaines). En 2016, les émissions anthropogéniques ont baissé pour atteindre 100 millions de t.

Émissions naturelles : par les volcans, estimées, en moyenne, à 4 millions de t/an et par les eaux côtières (par oxydation du diméthylsulfure produit par des bactéries). L’émission dans l’atmosphère par le volcan Pinatubo (Philippines), du 11 au 15 juin 1991, a été estimée à 20 millions de t de SO2. L’éruption volcanique du Bároarbunga, en Islande, du 31 août 2014 jusqu’en février 2015, a émis 11±5 millions de t, soit journellement 3 fois plus que les émissions anthropogéniques européennes.

Émissions humaines : principalement par l’utilisation de combustibles contenant du soufre (le soufre est oxydé en dioxyde de soufre), particulièrement pour la production d’électricité et lors du traitement de minerais sulfurés (galène, blende, pyrite, minerais de cuivre, de nickel…).

Teneurs en soufre de quelques combustibles et carburants : en % pondéral.

  • Charbon pauvre en S : inférieure à 1 %.
  • Charbon riche en S : de 2 à 5 %.
  • Pétrole brut : varie de moins de 0,5 % pour les pétroles à très basse teneur (par exemple le pétrole algérien) à plus de 3 % pour les pétroles à très haute teneur.
  • Fuel lourd : 3 %.
  • Essence et carburant diesel : inférieure à 10 ppm (10 mg/kg), en France depuis le 1er janvier 2009.
  • Fuel domestique : inférieure à 0,10 %, en France, depuis le 1er janvier 2008.
  • Propane : inférieure à 0,005 %.

Quantités de SO2 émises par les activités humaines dans quelques pays : en 2018, Union européenne : 2,117 millions de t.

en milliers de t
Inde, en 2016 11 100 France 136
Chine, en 2016 8 400 Italie 110
Russie 3 703 République tchèque 96
États-Unis 2 111 Grèce 65
Turquie 2 528 Islande 55
Australie 2 121 Portugal 45
Kazakhstan, en 2016 1 796 Belgique 38
Canada 812 Finlande 33
Japon 694 Pays Bas 24
Pologne 501 Suède 17
Allemagne 289 Norvège 16
Espagne 197 Irlande 12
Royaume Uni 159 Suisse 5

Sources : EMEP, Officially reported emission data et OECD.stat

Les émissions dues au transport maritime international sont estimées, en 2005, à 12 millions de t.

Évolutions :

Après une augmentation régulière des émissions depuis la révolution industrielle, la diminution des émissions est générale depuis 1980, sauf en Chine où la décroissance a commencé en 2007 et en Inde où la croissance se poursuit. Dans le monde, les émissions qui étaient estimées à 20 millions de t en 1900, atteignent un maximum de 131 millions de t en 1980, décroissent jusqu’à 108 millions de t, en 2000, pour remonter, sous la pression chinoise, à 115 millions de t, en 2005 et ensuite décroitre, avec la décroissance chinoise, à 100 millions de t, en 2016.

De 2007 à 2016, les émissions chinoises ont diminué de 75 %, passant de 36,6 millions de t à 8,4 millions de t alors que celles de l’Inde ont augmenté de 50 % passant à 11,1 millions de t.

Dans l’ensemble des pays constituant actuellement l’Union européenne, à 28, les émissions sont passées de 25,4 millions de t, en 1990 à 2,3 millions de t en 2017 soit une diminution de 91 %.

En France métropolitaine, les émissions sont passées d’un maximum de 3,598 millions de t, en 1973, à 1,207 million de t, en 1990 et 114 000 t en 2019.

Aux États-Unis, les émissions sont passées de 17,3 millions de t, en 1980, à 2,489 millions de t, en 2017.

Répartition des émissions : en 2019.

Industries manufacturières et construction 40 % Extraction et distribution du pétrole et gaz naturel 11 %
Transformations de l’énergie 23 % Industries métallurgiques 5,0 %
Résidentiel, tertiaire, agriculture 14 % Transport 3,1 %

Dans l’Union européenne, en 2017, la production et distribution d’énergie représente 48 % des émissions, l’industrie, 32 %.

Aux États-Unis, en 2016, 44 % des émissions provient de la production d’électricité, principalement à partir de charbon. Les autres activités industrielles comptent pour 43 %.

En Chine, 85 % des émission provient de la combustion de charbon, 9 % des activités industrielles, 3 % du raffinage pétrolier, 1 % de la combustion de biomasse.

Rôle industriel

Le dioxyde de soufre est principalement un produit intermédiaire dans l’élaboration de l’acide sulfurique (voir ce chapitre). Il est obtenu par combustion du soufre, en présence d’air ou récupéré lors du grillage de divers sulfures métalliques tels que ceux de zinc, plomb, cuivre, nickel… (voir les chapitres correspondant à ces différents métaux).

Il intervient dans le procédé Claus de traitement du gaz naturel (voir le chapitre soufre).

Il est aussi utilisé comme désinfectant et antiseptique, en particulier dans l’alimentation (voir en fin de chapitre son utilisation en vinification).

Rôle sur la santé humaine

La présence simultanée de SO2 et de fines particules (fumées noires) en suspension dans l’air, à des teneurs supérieures à 500 µg.m-3 pour chacun des polluants peut causer des troubles graves de la respiration. SO2 joue un rôle essentiel dans la formation des smogs acides. Ceux-ci se forment par temps calme, en présence d’un anticyclone, par inversion atmosphérique : une couche d’air chaud se place au-dessus d’une couche d’air froid polluée par de la fumée, du SO2 et du brouillard. Le smog de Londres du 4 décembre 1952 a ainsi causé la mort de 4 000 à 8 000 personnes. Le smog photochimique, du type de celui de Los Angeles, se produit par beau temps et trouve son origine dans les hydrocarbures imbrûlés et les oxydes d’azote (pollution automobile) qui produisent de l’ozone.

La pollution par le dioxyde de soufre, outre des troubles de respiration, peut entraîner des risques cardiovasculaires pour des personnes fragiles. Une étude du réseau national de santé publique réalisée entre 1987 et 1990 en région parisienne et publiée en février 1996 indique, pour cette région, 54 décès prématurés par maladies respiratoires et 344 par maladies cardiovasculaires dus à la pollution par le dioxyde de soufre.

Les recommandations de l’O.M.S. sont les suivantes :

  • Teneurs inférieures à 500 µg.m-3 pour des durées d’exposition maximales de 10 minutes.
  • Teneurs inférieures à 20 µg.m-3 pendant des durées de 24 heures.

Pluies et dépôts acides

La pluie et la neige sont naturellement acides (pH = 5,6, conséquence de la dissolution du CO2 de l’atmosphère). Mais outre CO2, SO2 et les oxydes d’azote (NO, et NO2, notés NOx) sont également solubles dans les fines gouttelettes d’eau de la base des nuages (celle-ci est de 3 à 30 fois plus concentrée en acides que les pluies formées). SO2 est acide en solution aqueuse et, de plus, par oxydation il donne de l’acide sulfurique, NOx donne de l’acide nitrique. On considère qu’une pluie est acide lorsque son pH est inférieur à 5,6.
En 1980, en France, l’acidité était, en moyenne, due à 53 % à SO2, 23 % aux NOx, 25 % à l’ammoniac et à un moindre degré aux acides chlorhydrique et fluorhydrique. Ces dernières années, en France métropolitaine, avec la diminution de la pollution par SO2, la part de ce dernier n’est plus, en 2017, que de 7,5 % avec 30 % pour les oxydes d’azote et 62 % pour l’ammoniac. L’acidité des pluies est comptée en équivalent acide (Aeq), avec 1 g d’Aeq correspondant à 32 g de SO2, 46 g de NOx ou 17 g de NH3. Entre 1980 et 2017, en France métropolitaine la valeur de l’Aeq est passée de 186 kt à 60 kt.

Dans le monde, quelques valeurs exceptionnelles d’acidité des pluies ont été atteintes :

  • Un pH de 1,69 a été atteint en 1983 dans un brouillard, en Californie.
  • Le pH annuel moyen de 3,78 a été enregistré en 1967 à De Bier (Pays Bas).

Outre leur présence dans la pluie, SO2, NH4+ et NOx peuvent être fixés par les particules solides présentes dans l’atmosphère. On parle alors de dépôt acide.

Outre leur rôle sur l’acidification des lacs et le dépérissement des forêts (voir ci-dessous), les pluies acides participent à la détérioration du calcaire des bâtiments et statues en pierre. L’acier est également attaqué avec formation de sulfate de fer soluble dans l’eau.

Rôle sur l’acidification des lacs :

Les lacs d’eau douce à soubassement rocheux très siliceux (cas fréquent au Canada et en Scandinavie) ont un faible pouvoir tampon (on parle de faible capacité de neutralisation acide). Les précipitations acides sur ces lacs peuvent entraîner une diminution du pH. Lorsque le pH devient inférieur à 5, les populations de poisson diminuent considérablement ou disparaissent. Il a été calculé qu’une eau douce contenant 1,7 mg de Ca2+/L, de pH 6,5, voit ses poissons disparaître lorsque la moyenne à long terme, du pH des précipitations est inférieure à 4,3.

Rôle sur le dépérissement des forêts :

Lorsque les teneurs en SO2 de l’atmosphère sont très élevées, les arbres des forêts proches peuvent mourir. Cela a été le cas dans les Monts Métallifères, à la frontière Allemagne-République tchèque : plusieurs centaines de milliers d’hectares ont été détruits par la pollution due à la combustion dans des centrales thermiques de lignite riche en soufre.

Dans le cas des forêts d’Allemagne et de France, SO2, un temps incriminé, semble ne pas être la cause directe de la défoliation des arbres. Les facteurs les plus importants semblent être : les variations de climat (sécheresse, froid), la pauvreté des sols (carences en Mg2+, K+), l’action de l’ozone. L’acidité des pluies participe au dépérissement, en rendant plus fragile des arbres affaiblis par ailleurs par d’autres agressions et en entraînant les ions Mg2+ et K+ du sol ce qui peut occasionner des carences dans des sols acides.

Normes françaises

On distingue des valeurs limites horaires et journalières de concentration dans l’air et un objectif de qualité annuel.

  • Valeur limite horaire : elle est de 350 μg/m3 à ne pas dépasser plus de 24 fois par an.
  • Valeur limite journalière : elle est de 125 μg/m3 à ne pas dépasser plus de 3 jours par an.
  • Objectif de qualité en moyenne annuelle : inférieur à 50 μg/m3.

Par ailleurs, un seuil de recommandation et d’information est situé à 300 μg/m3 en moyenne horaire et un seuil d’alerte à 500 μg/m3 sur 3 heures consécutives.

Moyens de lutte contre les émissions de SO2

On peut agir par :

  • Diminution de la teneur en soufre des combustibles. Par exemple, à compter du 1er janvier 2020, le fuel maritime a vu sa teneur en soufre passer de 3,5 à 0,5 %.
  • Fixation du SO2 formé, dès la combustion, en injectant dans le foyer de combustion du calcaire ou de la chaux. La technique du lit fluidisé permet, en limitant la température de combustion à 850°C, d’atteindre des rendements de désulfuration de l’ordre de 90 %.
  • Désulfuration des fumées produites lors de la combustion par lavage humide à l’aide de calcaire ou de chaux, ou de solutions ammoniacales (voir le chapitre sulfate de calcium).
  • Autres traitements des fumées, avec formation de H2SO4 qui peut être récupéré : par oxydation catalytique (en présence de O2 et H2O, procédé Sulfacid) ou par oxydation à l’aide de H2O2 (procédé Peracidox).

Le traitement de désulfuration des gaz de combustion est, en général, associé à une filtration qui élimine en grande partie les poussières émises. Les conséquences de ces traitements ne peuvent qu’être bénéfiques pour la santé humaine. Toutefois, la diminution importante des émissions de poussières (en général basiques) qui neutralisent l’acidité du SO2 nécessite une élimination d’autant plus importante des émissions de SO2 pour que celles-ci soient sans effet sur l’acidification des lacs et le dépérissement des forêts. Par ailleurs, le SO2 présent dans l’atmosphère, fixé ou non sur des poussières, a un effet bénéfique sur les cultures, en particulier sur des sols très calcaires. Les retombées atmosphériques, comptées en SO3, ont chuté, en France, de 91 à 23 kg/ha entre 1973 et 1996 ce qui a entraîné des carences en élément soufre, pour la culture du blé, dans des régions très calcaires.

Le dioxyde de soufre en vinification

En général, les vins sont traités à l’aide de dioxyde de soufre en cours de vinification puis pour leur conservation. SO2 est antiseptique et réducteur.

  • Il empêche le développement de micro-organismes (levures, bactéries) et évite ainsi diverses fermentations indésirables telles que, par exemple, la fermentation acétique.
  • Il préserve les composants du vin de l’oxydation, en particulier celle de polyphénols et d’éléments de l’arôme. Il prévient la madérisation.

Au pH du vin (entre 2,8 et 3,6), en solution, SO2 est principalement sous forme d’ion hydrogénosulfite HSO3 selon l’équilibre :

SO2 + H2O = HSO3 + H+           avec un pK1 = 1,81

C’est principalement SO2 « libre » qui possède des propriétés antiseptiques.

Pour un vin de pH 2,8, 10 % du SO2 n’est pas ionisé en HSO3. A pH 3,8 seulement 1 % du SO2 reste « libre ». Par ailleurs, une partie du SO2 introduit réagit avec divers constituants du vin (éthanol, sucres…). Les vins blancs doux (par exemple le Sauternes), riches en sucre, doivent être traités par des quantités plus importantes de SO2.

Doses de SO2 utilisées : en mg de SO2/L de vin.

  • Vins rouges : 5 à 20.
  • Vins blancs secs : 20 à 40.
  • Vins blancs doux : 60 à 100.

Des doses trop fortes donnent l’odeur piquante et irritante caractéristique du SO2 et neutralisent le bouquet du vin. Des doses trop faibles ne protègent pas le vin du développement de levures.

Formes d’introduction du SO2 :

  • Gazeuse à partir de bouteilles de SO2 liquide, sous pression (3 atm à 20°C).
  • En solution aqueuse de SO2 : 50 à 80 g de SO2/L de solution.
  • En solution aqueuse concentrée d’hydrogénosulfite de potassium (KHSO3).
  • A l’aide de pyrosulfite (ou métabisulfite) de potassium solide (K2S2O5).
  • Par combustion de plaques de soufre, vieille technique du méchage des fûts en bois.

Évolution : la tendance est à la diminution de la teneur des vins en SO2 afin de préserver au mieux le bouquet, en améliorant les conditions d’hygiène lors de la vinification afin de protéger les installations et le matériel de contaminations par des micro-organismes.

Bibliographie

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